Les messages écrits sur la fenêtre du TGV, « Laissez-vous rêver », laissent rêveur. Les doutes et les interrogations rythment nos vies, le déconfinement, le retour à la vraie vie, la responsabilité du monde d’avant, la réalité du monde d’après… À quoi va ressembler notre nouvelle vie normale ? Les incertitudes demeurent.
Les mêmes questions se posent quant à notre métier, la sécurité privée. Entre les errements du CNAPS et ceux du parcours de la loi « sécurité globale », les doutes restent nombreux alors qu’il ne s’agit plus de rêver. Comment doit-on faire pour que les salariés « reprennent » en toute sécurité ? Quel rôle pour la sûreté-sécurité de demain ? Comment gérer un déconfinement progressif à l’inverse d’un confinement plus ou moins strict ? Essayons d’anticiper, c’est la réflexion que je vous propose d’étudier aujourd’hui.
Retour aux fondamentaux : sécurité et sûreté
Parce que l’incertitude incite à revenir aux fondamentaux, il m’a paru essentiel de bien connaître la différence de deux mots proches : la sécurité et la sûreté. À mes débuts, j’aurais été bien incapable d’en mesurer la véritable portée. Ces termes m’ont fait comprendre l’importance de la différence entre intention et accident.
Les actes de malveillance naissent d’une volonté ou d’une intention. Tout ce qui se rattache à une volonté intentionnelle de nuire dépend de la sûreté. C’est à la sûreté de prévenir et de lutter contre les actes de ce type. Entre terrorisme et cyberattaque, petit larcin et crime en bande organisée, tag et profanation d’un lieu de culte, vols et intrusions, la palette est large, changeante et presque sans fin. C’est là que se trouve tout l’intérêt, mais aussi toute la difficulté.
La sécurité, quant à elle, concerne les risques à caractère accidentel ou liés à des catastrophes naturelles. Sa mission est donc de prévenir et d’agir en cas d’incendie, de secours à la personne, d’accident industriel, d’atteinte à l’environnement, de catastrophe pandémique ou climatique… Là aussi, nous pourrions avoir un inventaire à la Prévert.
La sûreté
Faire respecter les règles, faire attendre, faire reculer, demander à ouvrir les sacs, les palpations, la gestion des flux de véhicules ou des foules, les rondes, la vidéosurveillance : les missions de la sûreté sont aussi nombreuses que les risques et les enjeux.
Dans le cadre de la vie en entreprise, sur les sites, il y a un premier challenge : remettre les salariés à leurs postes et recréer une vie de bureau. Cela induit de faire accepter les contraintes liées au retour. Entre frustrations, mesures spécifiques, risques psychosociaux, rixes, tensions, burn-out et menaces terroristes toujours présentes, la sûreté conserve un rôle important à jouer, sans oublier que sa mise en œuvre doit tenir compte de l’équilibre toujours délicat entre fermeté et pédagogie.
Savoir garder son calme et gérer des situations complexes vont faire partie du quotidien des équipes de sûreté. Les accompagner, les aider, les former vont être, in fine, ce qui fera une différenciation de qualité de prestation. Nous en avons bien conscience chez SGP. Nous nous attendons à des demandes de renfort. Il s’agit d’anticiper le recrutement et de prévoir des formations nouvelles, ce qui fait penser au « facteur Gretzky »(1).
La sécurité
Contrairement à la sûreté, la sécurité, notamment la sécurité incendie, n’a pas connu le même arrêt. Les agents ont continué à exercer, mais dans des bâtiments tristement vides. Pour autant, cela n’a pas empêché des incendies ravageurs, comme celui des infrastructures d’OVH(2). L’incendie de Notre-Dame, dans le monde d’avant, nous rappelle que ce risque sera tout aussi présent dans le monde d’après.
Ces incendies prouvent, si cela était encore nécessaire, toute la légitimité de notre profession pour que soient inclus les agents de sécurité incendie dans les règles du Livre VI sur la sécurité intérieure. Les discussions récentes autour de la loi « sécurité globale » ont montré que tout le monde n’avait pas conscience de tous les risques. En première lecture, l’assemblée n’avait pas intégré cette évolution et les sénateurs ont tenté de corriger cette lacune. Après un passage en commission mixte paritaire, la loi vient d’être adoptée(3). Le résultat de tout cela est qu’un rapport devra être rendu dans 18 mois examinant l’opportunité de réglementer certaines activités, dont la moralité des agents de sécurité incendie. Déconcertant de parler d’opportunité, pour ne pas dire lunaire !
L’actualité confirme tous les jours que la formation est un point majeur dans nos organisations. Sans même parler de virus, l’eau, le feu, le vent, la pluie, la nature, les catastrophes naturelles et bien d’autres peuvent faire basculer brutalement un environnement stable vers un environnement chaotique. Former nos agents incendie à l’imprévisible doit être l’une de nos priorités. Sur ce point, je peux annoncer qu’une unité mobile de formation incendie intégrera prochainement le centre de formation interne de SGP. Celui-ci intégrera également un drone permettant des exercices, des formations, de la sensibilisation aux nouveaux risques d’aujourd’hui et de demain.
Au même titre que la sûreté, la sécurité devra-t-elle être mise à contribution pour prévenir les risques sanitaires ? Nous pensons que oui, mais encore une fois, le dialogue doit s’ouvrir afin que nous puissions exercer sans crainte d’être, légalement, en dehors de nos missions. En effet, la prise de température, mesure parmi d’autres pour prévenir les risques de propagations de maladies infectieuses, a « glissé » vers les agents de la sécurité privée. Il est important de préciser ici qu’à cette date, il n’y a aucun écrit, aucune régulation faite sur ce point. Le ministère de l’Intérieur et les partenaires sociaux devraient se réunir urgemment pour parler de ce sujet. Nous allons certainement avoir des clients en demande et des salariés en opposition, créant des tensions qui pourraient être évitées.
Mieux se coordonner
Nous l’avons vu, les missions de sûreté et de sécurité diffèrent. Cependant, les deux fonctions vont devoir œuvrer main dans la main pour les réouvertures des sites et le retour des foules. Fermer les portes fut assez simple ; les rouvrir n’est pas si aisé. Les responsables, sûreté, sécurité, ou les « RUS », ont un rôle de chef d’orchestre et d’équilibriste à assurer. Réunions, plans d’action, informations, consignes claires, exercices, gestion des risques et respect des mesures au fil de l’eau seront une infime partie de la longue liste d’actes sur lesquels ils devront travailler et réfléchir.
Une fois de plus, la France se caractérise dans ce domaine ; dans la réalisation des missions, les rôles sont bien définis, et un agent de sûreté n’a pas le droit d’effectuer les missions de son collègue de la sécurité incendie, et réciproquement. Cette séparation est beaucoup moins marquée chez nos voisins, voire pas du tout. À l’origine, il y a cinquante ans, cette séparation des rôles avait tout son sens, mais probablement qu’aujourd’hui, avec l’évolution des techniques, en particulier dans la construction des bâtiments et des technologies, il serait possible et intelligent d’avoir davantage de liens et de flexibilité entre ces deux métiers sans perdre, au contraire, en qualité de prévention et de gestion des risques. À l’aube de rendez-vous importants, comme les Jeux olympiques, nul doute que s’en soucier et approfondir cela ne serait pas incongru.
Une sûreté-sécurité plus verte
S’il y a bien une certitude dans ce monde incertain, c’est que l’environnement, la RSE, l’écologie, la nature et les achats plus « green » et plus responsables deviennent des aspects essentiels. La crise de la COVID-19 aura cet effet secondaire et positif de mettre encore plus en valeur ces démarches. Le business model d’EcoVadis(4) n’a pas trop de souci à se faire ! Cette plateforme a remis cette année la médaille d’argent à SGP, nous en sommes fiers. Notons aussi la certification ISO 14001(5) qui fait gravir à une entreprise comme la nôtre les premières marches pour organiser ses responsabilités environnementales.
Quand on s’intéresse réellement à ce sujet, les idées sont nombreuses : la dématérialisation des données, l’utilisation de fournisseurs plus « green », des tenues plus écologiques, des semelles de chaussures réutilisables, la limitation de CO2 dans ses bâtiments, dans ses déplacements, dans sa manière de faire, comme le nettoyage des VL sans eau, le tri de ses déchets, etc. À n’en pas douter, les acteurs qui ne se dirigeront pas dans cette voie seront loin d’être dans la sécurité de demain. Enfin, nous pouvons aussi citer Luc Ferry qui, dans son dernier ouvrage(6), écrit : « C’est donc du côté de l’écomodernisme et de l’économie circulaire, des hautes technologies et de l’innovation que l’écologie doit s’orienter si elle ne veut pas rester aussi inefficace que répulsive. » Cette phrase résume parfaitement le chemin qu’il y a encore à parcourir pour l’écologie tout court et pour, bien entendu, que l’on ait demain une sécurité plus verte. Il n’y aura pas de rendez-vous manqué pour SGP. Nul doute que le fait d’être certifié(7) va compter.
Pour conclure
Pour les acteurs de la sécurité privée, être à la hauteur des attentes, qu’elles soient publiques ou privées, n’est pas une option. Le savoir-faire, le bon climat social, l’excellence de service, l’amélioration continue, le suivi terrain et notre rôle de conseil seront essentiels et, à n’en pas douter, des avantages concurrentiels. La concordance de vision entre le « RUS » et le prestataire sera un atout certain pour une reprise en toute sérénité.
Nos deux métiers, la sûreté et la sécurité, vont jouer un rôle primordial dans la remise en marche et le bon fonctionnement des différents sites mis à l’arrêt. Les agents de sécurité privée sont l’une des clés pour la sécurité de la nation, la COVID-19 l’a une fois de plus démontré. L’innovation, la réflexion, l’anticipation et une bonne préparation seront des éléments majeurs pour un déconfinement réussi. La vaccination aidera progressivement à diminuer les risques, mais un nouveau paradigme doit voir le jour, celui d’un monde plus « sécure ». SGP et ses collaborateurs sont tournés vers l’avenir et vers la sécurité de demain.
Bon déconfinement à toutes et tous,
Metz, le 05 mail 2021