Face aux évolutions des besoins des entreprises, aux bouleversements qu’apportent les savoirs et les techniques, le législateur a adopté en 2018 la Loi dite « Avenir ». Nous avons examiné dans une première partie, publiée le 24 mai 2022, les nouvelles modalités de la formation professionnelle.
Abordons à présent le nouveau dispositif de certification, Qualiopi, ainsi que les modes de financement de la formation professionnelle.
Le nouveau dispositif de certification
Désormais, seul France Compétences centralise toutes les décisions d’agrément des nouvelles certifications.
Il y a deux grands types de répertoires dans lesquels sont enregistrées les certifications professionnelles :
- Le RNCP (Répertoire national de certification professionnelle), qui comprend :
– les diplômes de l’enseignement secondaire et du supérieur, qui sont admis de droit après avis des CPC (commissions paritaires consultatives) et par une concertation spécifique avec les partenaires sociaux pour le supérieur ;
– les titres professionnels (composés de blocs de compétences) du ministère du Travail ;
– les certifications professionnelles délivrées au nom de l’État, mais qui ne bénéficient pas de l’enregistrement de droit ;
– les certifications professionnelles établies par des certificateurs privés (organismes de formation, chambres consulaires, établissement d’enseignement supérieur).
Toutes ces certifications font l’objet d’une étude par la commission de France Compétences en charge de la certification professionnelle et sont enregistrées pour une durée de cinq ans maximum.
- Le répertoire spécifique qui remplace « l’inventaire » et qui comprend :
– les certifications provenant des ministères et des organismes certificateurs complémentaires des certifications professionnelles. Elles décrivent un ensemble homogène de compétences, spécifiques à un domaine professionnel particulier ou ayant un caractère de transversalité qui répond aux besoins d’une ou de plusieurs activités professionnelles ;
– certains CQP (certificats de qualification professionnelle) délivrés par les branches professionnelles et qui permettent de reconnaître les compétences et les savoir-faire requis pour l’exercice d’un métier. Les CQPI (interbranches) offrent quant à eux la reconnaissance de compétences interbranches.
Les CQP peuvent être enregistrés par France Compétences au RNCP ou au répertoire spécifique, selon les cas.
La loi « Avenir » permet un enregistrement simplifié des certifications professionnelles conduisant à des métiers particulièrement identifiés en évolution ou en émergence. Une liste de ces nouvelles certifications est arrêtée chaque année avec une durée maximale de trois ans pour chacune d’elles.
La certification qualité des organismes de formation
La loi « Avenir » institue une nouvelle certification qualité, obligatoire pour les organismes de formation, qui se substitue à toutes les habilitations précédentes du CNEFOP (Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle), comme la qualification OPQF pour l’ISQ (Institut supérieur de la qualité) et le DataDock.
À compter du 1er janvier 2022 (recul d’une année à cause de la crise sanitaire), tous les organismes de formation désirant bénéficier de financements de l’État auront l’obligation d’avoir obtenu la certification qualité Qualiopi, qui atteste de la mise aux normes qualité fondée sur sept critères (deux sur le pilotage, trois sur les processus opérationnels et deux sur la mise à disposition des ressources) et trente-deux indicateurs ainsi que deux relatifs aux organismes multisites. Les établissements d’enseignement supérieur en sont dispensés.
Les organismes certificateurs, au nombre d’une vingtaine, sont accrédités par le COFRAC, organisme de référence en matière d’accréditation.
La certification qualité Qualiopi concerne les actions de formation qui relèvent de l’apprentissage (formation initiale), de la formation continue (dont le contrat de professionnalisation), de la VAE et du bilan de compétences.
Cette certification est donnée pour trois ans, des audits de surveillance sont prévus entre le quatorzième et le vingt-deuxième mois suivant la date d’obtention de la certification Qualiopi. Un audit de renouvellement sera effectué au cours de la troisième année.
Lors de l’audit, les non-conformités, mineures ou majeures, relevées doivent être levées par la mise en place d’un plan d’action qui vise à mettre en œuvre les actions correctives appropriées.
Les financements : le pilotage et les nouveaux opérateurs de la nouvelle gouvernance de la formation professionnelle
1 – Financement de la formation professionnelle : d’où proviennent les fonds ?
Depuis la loi « Avenir », le financement est composé de :
– la contribution unique à la formation professionnelle (taux de 0,55 % pour les entreprises de moins de onze salariés, de 1 % pour les entreprises de onze salariés et plus, et de 1,3 % pour les entreprises de travail temporaire de onze salariés et plus) ;
– la contribution au développement de l’apprentissage (taux de 0,68 % de la masse salariale pour les sociétés assujetties et de 0,44 % en Alsace-Moselle) ;
– la contribution supplémentaire à l’apprentissage, qui concerne les entreprises de plus de deux cent cinquante salariés et n’ayant pas atteint le seuil de 5 % des effectifs en alternance ;
– la contribution au financement du CPF des salariés en CDD (1 % de la masse salariale pour six catégories de CDD) ;
– des opérateurs publics : Pôle emploi, l’APEC, les Missions locales et les CAP emploi bénéficient de financements de l’État pour les personnes en situation de handicap ;
– des fonds nouveaux mis à la disposition de Pôle emploi et des régions pour renforcer les compétences des demandeurs d’emploi, améliorer leurs qualifications et celles des jeunes, mais aussi pour mieux répondre aux besoins des métiers en tension et à leurs transformations dues aux nouvelles contraintes des transitions environnementales et numériques.
Ces fonds sont issus de la collecte de la formation professionnelle auprès des entreprises et sont versés à France Compétences, qui les gère dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences (PIC) soutenu par l’État.
2 – Pilotage, nouvelles structures et nouveaux acteurs
La loi « Avenir », comme nous venons de le voir, a touché à l’ensemble du système de formation professionnelle et a mis en place de nouvelles structures, au premier rang desquelles se trouvent France Compétences et ses OPCO ainsi que de nouveaux acteurs.
Le système de gouvernance a été profondément modifié. L’Agence France Compétences est désormais l’unique instance de gouvernance nationale de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Elle est gérée par l’État, les régions et les partenaires sociaux, et doit conduire la politique nationale de la formation professionnelle et de l’apprentissage via les OPCO qui sont les représentants des branches professionnelles.
Les régions, auparavant acteurs principaux, ne décident plus des créations de CFA et n’en contrôlent plus la gestion et le développement. Elles siègent au conseil d’administration de France Compétences et se sont vu confier de nouvelles missions, parmi lesquelles l’information et l’orientation pour la formation professionnelle, et de l’apprentissage. Toutefois, elles continuent de jouer un rôle essentiel dans le financement de l’apprentissage (investissement et fonctionnement par la majoration des coûts-contrats). Il n’est pas impossible que son rôle évolue dans les prochaines années.
L’une des plus importantes responsabilités de France Compétences est de répartir les fonds de la formation, collectés par l’URSSAF (à partir de janvier 2022) auprès des entreprises, de réguler et de contrôler le marché de la formation professionnelle.
La Caisse des dépôts et consignations (CDC) a pour mission de gérer le CPF. Les organismes de formation habilités et certifiés pourront être payés directement par la CDC pour leurs prestations de formation.
Les commissions paritaires examineront les projets de transition professionnelle afin de les financer.
Les OPCO (émanation des branches professionnelles), qui ont succédé aux OPCA, répartissent l’argent de la formation (apprentissage, formation continue et contrats pro, VAE, bilan de compétences…) et ont la mission d’accompagner les projets de formation des entreprises de moins de cinquante salariés. Ils soutiennent la politique des branches professionnelles dont elles dépendent.
Conclusion
Cette loi représente une transformation majeure dans le domaine de la formation professionnelle avec toutes les implications qu’elle porte, dans tous les secteurs professionnels.
Sa mise en application a d’ores et déjà permis de donner des résultats notables, en particulier dans la formation par apprentissage qui a vu se développer son offre de formation et son nombre de contrats d’apprentissage, et donc d’apprentis, et qui a contribué à mobiliser les entreprises comme jamais, avec, il est vrai, des aides importantes de l’État.
Cette loi constitue, de toute évidence, le socle évolutif de nouvelles dispositions en faveur de la formation professionnelle que viendront compléter des aménagements de dispositifs et de structures.
Toutefois, des adaptations sont dès à présent nécessaires pour en faire bénéficier tous les publics auxquels elle s’adresse : jeunes en demande de formation, salariés, professionnels en transition, demandeurs d’emploi et jeunes sans qualification.
Elie de Saint Jores
Directeur de la Fédération Compagnonnique du Tour de France
Auditeur qualité Qualiopi (certifié AFNOR)
Maire-adjoint développement Economique Emploi
Conseiller Territorial Vallée Sud Grand Paris
Consultant expert en sécurité et défense