Nouvelles obligations pour les formateurs et centres de formation en sécurité privée

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Un décret publié le 4 avril 2024 est venu préciser les modalités de contrôle des organismes de formation et ajouter de nouvelles règles d’accès à la profession de formateur et de dirigeant de centre de formation. Ce texte de loi précise en réalité les attendus posés naguère par la loi Sécurité globale de 2021.

Si certaines dispositions s’inscrivent dans un mouvement global cohérent en renforçant les contrôles des centres, il demeure d’étonnantes zones d’ombre. Petit tour, non exhaustif, des principaux changements applicables au monde de la formation en sécurité privée qui entreront en vigueur au 1er mars 2025.

Renforcement des contrôles

Poursuivant la logique d’assainissement de la profession, le gouvernement a tenu avec la loi relative à la sécurité globale à inclure la formation dans son champ d’intervention. Les travaux engagés avec la certification Qualiopi, entrée en vigueur le 1er janvier 2022[1], se poursuivent donc avec le nouveau décret.

Afin d’éviter les certifications « de confort », le texte de loi renforce la fréquence et les modalités de délivrance de cette norme. Les contrôles seront désormais annuels, mais pourront essentiellement se faire « sur pièces ». L’organisme de formation devra alors prouver qu’il dispose de tous les documents obligatoires, et à jour, pour exercer convenablement ses missions pédagogiques et d’apprentissage. Cependant, au moins une fois tous les trois ans, ce contrôle devra se faire « sur place » afin sans doute de s’assurer que derrière de beaux documents ne se cachent pas d’éhontés mensonges et omissions.

Le texte de loi prévoit également un renforcement du partage d’informations entre d’un côté le certificateur et de l’autre le CNAPS, agissant comme organe de contrôle de la profession. Chacun devra transmettre ses informations à l’autre partie s’il constate des manquements liés aux lois, règlements et obligations professionnelles. Si tel est le cas, le certificateur devra réaliser un contrôle sous trois mois et prévenir le CNAPS en cas de persistance du manquement.

Notons que si d’aventure l’organisme certificateur lui-même ne respectait pas ses obligations, il pourrait également être sanctionné par le CNAPS qui, dans la foulée, en avertirait France Compétences. On ne doute pas qu’en cas de survenance d’un tel événement, l’organisme certificateur pourrait alors perdre son autorisation d’exercer.

Le CNAPS se voit donc renforcé dans sa mission disciplinaire tant auprès des organismes de formation que des certificateurs.

Enseignement et examens

Sur le plan pédagogique, le texte est pour le moins succinct et l’on constate un absent de marque, celui de la réforme du contenu du MAC APS. Ce diplôme d’actualisation des compétences, sésame obligatoire pour chaque agent devant exercer le métier, est en application depuis le 1er janvier 2018. Les agents de sécurité doivent le renouveler tous les cinq ans. Cela veut donc dire que les premiers agents ayant passé leur MAC APS en 2018-2019 ont déjà dû le repasser en 2023-2024… avec exactement le même contenu qu’il y a 5 ans.

Le MAC APS visait essentiellement à transmettre à tous les anciens de la profession trois longs modules, en grande partie théoriques, apparus lors de la refonte du diplôme d’agent de sécurité. Terrorisme, palpation et événementiel, ainsi que gestion des conflits constituaient la majeure partie du contenu du MAC APS.

Cinq ans plus tard, l’objectif est réalisé, chaque agent de sécurité dispose des mêmes enseignements sur ces trois thématiques. Pourtant rien n’a changé dans le contenu du MAC.

On aurait pu arguer que de nombreux recyclages et remises à niveau ne font que peu évoluer leur contenu, l’essentiel étant de rafraîchir les connaissances et de refaire les gestes techniques importants aux apprenants, en SST comme en SSIAP par exemple.

De plus, la partie pratique concernant ces unités de compétences s’avère toujours aussi judicieuse alors que la flamme olympique est sur notre sol et les Jeux Olympiques déjà à nos portes. Il n’en demeure pas moins que l’objectif initial du MAC est bien réalisé. On aurait donc pu espérer qu’une refonte de ce dernier soit présentée, de nouvelles voies d’améliorations esquissées, de nouveaux champs de connaissances explorés. Il n’en est rien, l’actualisation du contenu du MAC est renvoyé aux calendes grecques, preuve que le problème est connu mais qu’il n’est pas affronté.

Dans le même esprit, on ne peut que regretter l’absence de décision quant aux possibilités d’usage du distanciel dans l’animation pédagogique de certains modules. Il serait pourtant temps de permettre cette option pour le TFP APS et le MAC APS dans une optique de réduction des temps de trajet avec les économies de temps, d’énergies et de respect de l’environnement que cela permettrait. De nombreux centres sont déjà prêts et l’appliquent avec succès dans d’autres domaines formatifs.

Du côté des examens du TFP APS, on constate également de menus changements puisque c’est désormais directement le CNAPS qui s’occupera de la validation des épreuves théoriques en remplacement de l’ADEF.

Le passage de l’examen pratique est désormais conditionné à la réussite de l’examen théorique, ce qui risque de considérablement changer la donne quant aux résultats des organismes de formation. Actuellement, le candidat enchaîne dans une journée théorie et pratique et peut donc obtenir l’un ou l’autre, voire bien entendu, et c’est même l’objectif, les deux. En cas d’échec partiel, il peut se réinscrire à une future session d’examen et ne passer que ce qu’il a manqué.

À partir du 1er mars 2025, alors même qu’il aura passé cinq semaines à s’entraîner sur les deux aspects, une erreur sur quelques questions spécifiques pourra signifier un échec complet, obligeant le candidat malheureux à repasser théorie et pratique dans un délai plus ou moins long, tout en ayant nécessairement perdu certains réflexes entre l’examen initial et son deuxième passage. De quoi assurément augmenter le stress des candidats et les casse-têtes organisationnels pour les organismes de formation mais surtout de quoi donner un véritable enjeu et garantir une meilleure implication de chaque stagiaire à sa formation.

Le décret du 4 avril vient approfondir les exigences relatives aux formateurs, ainsi qu’aux dirigeants d’organismes de formation en sécurité. Ces derniers devront être titulaires d’un agrément de dirigeant, obtenus dans les mêmes conditions qu’un dirigeant d’entreprise de sécurité privée. L’agrément suppose la présentation d’un justificatif d’aptitude découlant soit d’une expérience significative à ce poste, soit de l’obtention du diplôme du TFP dirigeant. La demande d’agrément est à renouveler tous les cinq ans et fera l’objet d’une vérification de moralité par les services du CNAPS. Il y a là encore un véritable objectif de cohérence dans l’encadrement et les attendus de l’ensemble de la chaîne de sécurité.

Enfin, les formateurs devront également être titulaires d’une carte professionnelle de formateur. Délivrée par le CNAPS, elle reprend l’ensemble des attendus exigés pour un agent de sécurité, à ceci près que le formateur n’est pas dans l’obligation de justifier de l’accomplissement d’une quelconque formation. Il apparaît que l’objectif prioritaire est de mettre un terme à certaines pratiques douteuses qui voyaient des salariés privés de carte professionnelle s’improviser formateurs dans le cadre de leur reclassement, suite à une décision du CNAPS. On regrettera que les rédacteurs du décret n’aient pas profité de cette opportunité pour assurer une harmonisation de la transmission des compétences et des pratiques en imposant le suivi d’une formation spécifique. Une prochaine étape sans doute de la longue route vers l’excellence de la profession.

Même les textes de loi les plus techniques ne cachent jamais complètement la philosophie qui les sous-tend. Le décret comprend de nombreuses dispositions relatives à l’organisation des examens, à l’ajout de règles administratives et autres documents désormais obligatoires dans une vision que l’on pourrait estimer purement technocratique. Mais ce qu’il traduit en creux est la fin de certaines pratiques déviantes et autres tentatives de contournements du système. Il matérialise une nette reprise en main des organismes de formation par le CNAPS qui avalise dorénavant l’examen théorique du diplôme d’agent de sécurité. On peut d’ailleurs se demander si ce n’est pas la faiblesse des effectifs de cet organisme qui a empêché la mise en place d’un contrôle direct des examens pratiques. Rien ne dit que cela n’adviendra pas dans le futur. D’autres modèles pourraient également être envisagés, les forces de sécurité publiques devenant par exemple jury d’examen comme cela existe dans d’autres pays[2] et contribue à valoriser un métier qui en a plus que jamais besoin.

En l’état, le texte accomplit déjà beaucoup et mars 2025, date de son application concrète, devrait ouvrir de belles perspectives aux centres sérieux, compétents, préparés et en ordre de marche.

Sachez enfin que le CNAPS lui-même a publié tout récemment six fiches thématiques sur ce sujet:

Une affaire à suivre donc…


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