Le saviez-vous ?
Histoire et contexte
de la sécurité
privée
Histoire de la sécurité privée
Les origines
Vidocq (1775-1857) est un personnage bien présent dans l’imaginaire français.
Repris par Balzac à travers celui de Vautrin dans La Comédie humaine, par Victor Hugo avec Jean Valjean, il est porté sur le petit écran par Claude Brasseur dans une célèbre série des années 70. Il pourrait aussi incarner le début de la sécurité privée. Sulfureux, Vidocq fut successivement délinquant, bagnard, indicateur et policier avant d’ouvrir une agence de détectives privés spécialisée tant dans le renseignement économique que dans les adultères, considérés à l’époque comme un délit.
Cette origine aux liens flous entre voyoucratie, police et sécurité privée va durablement marquer cet environnement. Les premières sociétés de sécurité naissent véritablement à la fin du XIXe siècle. La plus ancienne identifiée semble être SPS, la Société Parisienne de Surveillance, qui, au fil des histoires, rachats et fusions, est devenue Proteg, filiale du groupe Adecco et numéro un français au cours de l’ère moderne (post 1980). Rachetée en 1997 par Securitas, numéro un mondial d’origine suédoise, elle est aujourd’hui le leader national. Cette origine aux liens flous entre voyoucratie, police et sécurité privée va durablement marquer cet environnement.
XIX siècle
Les premières sociétés de sécurité naissent véritablement à la fin du XIXe siècle.
La plus ancienne identifiée semble être SPS, la Société Parisienne de Surveillance, qui, au fil des histoires, rachats et fusions, est devenue Proteg, filiale du groupe Adecco et numéro un français au cours de l’ère moderne (post 1980). Rachetée en 1997 par Securitas, numéro un mondial d’origine suédoise, elle est aujourd’hui le leader national.
1950
Le marché de la sécurité privée entame une mue importante au tournant des années 1950.
Pas de convention collective, pas de lois et aucun contrôle : la sécurité privée déclenche une ruée vers l’or. Policiers en retraite, gros bras et anciens légionnaires s’engouffrent dans un métier où renseignements et maintien de l’ordre lors de grèves étaient leurs premières missions, sans parler de liens sombres avec certains mouvements politiques. La sécurité privée va longtemps rester associée à cette mauvaise image. Il va sans dire qu’à l’époque, les dérives sont quotidiennes.
1981
Le virage vers un métier de professionnels s’effectue en 1981.
Un sans-abri se fait rouer de coups lors de l’intervention d’un agent de sécurité au Forum des Halles. Il succombe à ses blessures à l’hôpital. En 1982, pendant une grève générale dans une usine du Calvados, son P.-D.G. fait appel à une société de sécurité pour évacuer les grévistes ; un commando de deux cents personnes débarque dans l’entreprise, choquant population et pouvoirs publics par des pratiques extrêmement violentes. Les répercussions médiatiques sont majeures, et il devient impératif pour l’État de réglementer ce métier. C’est le 12 juillet 1983 que la loi encadrant la profession voit le jour. De nos jours, la « loi de 83 » est encore la base de tous les textes réglementaires enseignés dès la première formation d’un agent de sécurité.
1983
À partir de 1983, la professionnalisation se met en route. Les entreprises se multiplient, la convention collective se construit.
Des universitaires comme Frédéric Ocqueteau observent le mouvement, des thèses sont rédigées et des livres blancs, publiés. L’État, qui entame un désengagement de certaines missions, et la profession qui se structure bâtissent ensemble le cadre nécessaire à un métier aujourd’hui totalement intégré à la vie quotidienne des Français. La dynamique de progression est forte et accompagne l’évolution des besoins au sein desquels les attentats de 1995, du 11 septembre 2001 ou du Bataclan en 2015 sont souvent des marqueurs. De grands événements tels que l’Euro 2016 sont également des leviers importants pour le changement, tout comme les évolutions sociétales (urbanisation, risques environnementaux, climat…).
2019
La crise de la COVID-19 accentue davantage le besoin en sécurité privée et fait que prise de température et/ou contrôle de pass sanitaire deviennent des missions d’agents de sécurité.
L’État ne se prononce d’ailleurs pas sur ces missions qui peuvent être considérées comme « hors champ » de la convention collective.
Le CNAPS, histoire, ADN et missions
2011 a été la dernière grande étape structurante marquant la dynamique de professionnalisation. La loi met en place le CNAPS, le Conseil national des entreprises de sécurité privée.
Ce Conseil est né d’une volonté commune de l’État et de la profession de continuer à moraliser et à professionnaliser un secteur générant un chiffre d’affaires de près de six milliards d’euros et employant plus de cent soixante mille agents.
Établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’Intérieur créé par la LOPPSI 2 du 14 mars, le CNAPS est compétent sur l’ensemble du territoire et dispose de sept délégations territoriales en métropole et quatre délégations territoriales en Outre-mer.
Son périmètre d’intervention inclut l’ensemble des acteurs de la sécurité privée, de la formation – depuis la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi – en passant par la délivrance des autorisations pour chaque activité et l’action disciplinaire.
Respect des textes en vigueur
Son action quotidienne vise d’abord à faire respecter les textes en vigueur, qu’il s’agisse du livre VI du Code de la sécurité intérieure (CSI) encadrant les activités privées de sécurité ou d’autres textes.
Cela peut se faire par un travail partenarial avec l’autorité judiciaire ou d’autres autorités administratives. Elle permet aussi une concurrence plus loyale entre les sociétés de sécurité privée, ce qui améliore donc l’image de la profession tout en luttant contre des prix tirés vers le bas qui fragilisent l’ensemble des entreprises et de leurs salariés. Il s’agit de l’une des garanties offertes pour une meilleure co-production de sécurité entre la puissance publique et les acteurs de la sécurité privée.
Autorisation et du contrôle des professionnels
Le CNAPS se charge, au nom de l’État, de l’autorisation et du contrôle des professionnels de la sécurité privée, que ce soient des personnes morales ou physiques, exerçant dans les secteurs suivants :
- Surveillance humaine ;
- Surveillance par des systèmes électroniques ;
- Agent cynophile ;
- Opérateur de vidéoprotection ;
- Sûreté aéroportuaire ;
- Transport de fonds ;
- Maintenance et gestion de distributeurs automatiques de billets (DAB) ;
- Protection physique de personnes ;
- Recherches privées ;
- Protection des navires ;
- Formation aux activités privées de sécurité.
Missions du CNAPS
Voici les trois missions du CNAPS :
Une mission de police administrative par la délivrance des autorisations pour les personnes morales et physiques :
- Autorisations préalables et provisoires pour les personnes souhaitant effectuer une formation en sécurité privée ;
- Autorisations de stage, si celui-ci est prévu dans une formation publique ;
- Cartes professionnelles pour les agents ;
- Agréments palpation pour les agents ;
- Agréments dirigeants pour les exploitants individuels et les dirigeants, les gérants ou associés des entreprises de sécurité privée ;
- Autorisations d’exercer pour les sociétés et organismes de formation (personnes morales).
Une mission disciplinaire par le contrôle du respect du livre VI du Code de la sécurité intérieure, y compris par des partenariats avec d’autres services de contrôle de l’État (DIRECCTE, ACOSS, URSSAF, etc.).
Une mission de conseil et d’assistance à la profession pour accompagner ses évolutions dans le cadre de la loi, lui rappeler la réglementation et favoriser la professionnalisation.
Les syndicats patronaux
Histoire et évolution
Pour les activités de surveillance humaine, deux syndicats patronaux historiques,
le SNES et l’USP, ont animé la vie patronale des années 90 et 2000.
Le SNES a été vu comme le syndicat des PME et des ETI, et l’USP, comme le syndicat des grandes entreprises. Cette dichotomie est contestable lorsque l’on regarde la liste de leurs adhérents, mais l’imaginaire collectif créé par des volontés politiques est souvent plus fort que la réalité. Les deux syndicats avaient le pouvoir de signature des accords sociaux, mais n’étaient pas toujours, voire rarement, d’accord sur les modifications à envisager dans la convention collective (CCN). Là aussi, les jeux de pouvoir, et surtout un ou deux ego, ont longtemps empêché une uniformité ou une ligne directrice constructive, alors même que sur le fond, tout le monde semblait d’accord quant aux priorités : reconnaissance de la profession, rémunération trop faible et formation à développer.
En 2008, l’USP a obtenu la signature des syndicats salariés majoritaires et a réussi à imposer au SNES, qui s’y opposait, la création d’une dizaine de métiers repères, permettant ainsi un saut qualitatif de la CCN.
La crise financière de 2008 et ses conséquences financières sur les entreprises de sécurité privée ont gelé toute avancée sociale sur cette période. La mise en place du CNAPS à partir de 2011 mobilise une partie des ressources, et plusieurs négociations salariales annuelles au niveau de la branche débouchent sur du néant. Les syndicats salariés préfèrent refuser des augmentations de 1 à 2 % au profit du discours connu et radical « on ne veut pas des cacahouètes ». Le salarié sur le terrain est le premier perdant de cet immobilisme ; le SMIC rattrape et finit par dépasser le premier, puis le second niveau de la grille conventionnelle. Le dialogue social est en échec de 2010 à 2015.
Fin 2015, le leader Securitas, fatigué des guerres d’ego et de la paralysie de la profession.
Il crée un séisme en annonçant son retrait de l’USP et de toute activité patronale tant qu’un syndicat unique appelé par tous, mais torpillé par deux egos présidentiels, ne verrait pas le jour.
Le mouvement vers ce syndicat unique se déclenche en 2016. Les cinq leaders de la profession se retrouvent au sein du think tank, le Cercle de la sécurité privée. Ce dernier débouche sur « l’appel des dix » en 2018 pour une fusion des syndicats historiques. Le SNES et l’USP s’unissent en septembre 2019. Le GES, Groupement des entreprises de sécurité[1], est alors créé. Cette réunification est une bonne chose pour préparer les enjeux de demain et participe à la relance de l’indispensable dynamique de professionnalisation. Le GES est aujourd’hui le syndicat professionnel représentatif de la branche humaine de la sécurité privée (quatre milliards d’euros et environ cent quatre-vingt mille agents de sécurité).
Des métiers et compétences
Ils représentent + de 60 % du total et plus de 180 000 salariés
Surveillance humaine
Agents de sécurité assurant des missions de sûreté très variées (voir détail ci-dessous).
Sécurité incendie
Agents de sécurité assurant des missions de service de sécurité incendie et d’assistance à personne (SSIAP).
Métiers plus technique ou plus spécifique :
Télésurveillance
Un PC de télésurveillance est un plateau sécurisé, normé et certifié, qui gère les alarmes de milliers de clients. Il a un seul objectif : suivre les consignes et mettre en place les mesures nécessaires pour sécuriser le site si les vérifications engagées révèlent un problème réel. Cela peut se traduire par l’appel aux forces de l’ordre, aux pompiers, aux secours ou aux agents mobiles de la sécurité privée. Le marché s’organise autour de deux segments clairement identifiés : les particuliers et les professionnels.
Télévidéosurveillance
Les technologies de caméra, contrôle d’accès et réseaux permettent aujourd’hui d’assurer à distance ouvertures et fermetures de sites ainsi que des rondes de surveillance efficaces grâce aux caméras pilotées à distance depuis les PC. Il s’agit d’une évolution des pratiques de la télésurveillance qui se développe rapidement.
Électronique – vidéosurveillance, contrôles d’accès
Les caméras font partie de l’univers de la sécurité privée, tout comme les systèmes de badges ou d’identification qui donnent la possibilité de contrôler les accès. Il s’agit d’un marché très éclaté au sein duquel se croisent petits et grands, mondiaux ou locaux, issus de la sécurité, de l’électricité ou de l’ingénierie. De nombreux intervenants sont surtout des entreprises régionales.
Risk management – cybersécurité
Dans ce milieu se croisent des opérateurs de taille mondiale comme des consultants indépendants très spécialisés. Les compétences y sont multiples et souvent très pointues et spécialisées.
Protection rapprochée
Ce marché spécifique et peu développé en France représente environ mille cinq cents agents. Répartis uniquement dans les grandes villes, ils assurent la sécurité (officiellement non armée en France) des personnalités ou stars de la musique, du sport, de la politique…
Services connexes
De nombreux contrats de surveillance incluent l’accueil en entreprise. Cette activité doit se faire par le biais de sociétés différentes, car la sécurité privée a, depuis la loi de 1983, une obligation d’exclusivité de ses activités.
La surveillance humaine, au sens du CNAPS et de la législation, regroupe des métiers et des compétences très différents les uns des autres :
Agent de sécurité dit « posté »
Sur site, ces agents assurent les missions de sûreté de type filtrage, surveillance, tenue de poste de sécurité…
Agent rondier/sécurité mobile
Ces agents effectuent des rondes (ouverture, fermeture, surveillance aléatoire ou non…) ou des interventions sur alarme afin de faire des « levées de doute » et de déclencher les actions nécessaires en cas de problème (effraction, incendie…). Leurs missions se font avec des véhicules munis d’un logo (obligation légale).
Conducteur cynophile
Plus connue sous l’appellation « maître-chien », la profession des conducteurs cynophiles a toujours existé. Le tandem homme-chien est une solution bien adaptée à certains besoins. Cependant, au cours des années 2000, guerre des prix, chiens non formés, conditions de vie déplorables des animaux, trafic de papiers et drames humains liés à des chiens hors contrôles ont fait que le marché de la sécurité cynophile s’est effondré. Depuis 2015, cette activité a entamé sa mue vers des standards professionnels : formation de deux cent quatre-vingts heures, carte professionnelle obligatoire pour le maître et pour le chien. Cette évolution abandonne de fait le chien de défense pour se concentrer sur le chien « technique », c’est-à-dire détecteur de drogue ou d’explosifs. On note l’apparition de structures qui se spécialisent dans ce domaine.
Sûreté aéroportuaire
Ce marché s’est mis en place après les attentats du 11 septembre 2001 et représente aujourd'hui environ dix mille agents (en dehors des effets de la COVID-19). Cette partie de la profession est extrêmement réglementée, les formations obligatoires sont de plus de cent heures par an et les salaires, supérieurs de 25 % à ceux du reste de la profession. C’est un marché concentré et organisé.
Agent armé
Les derniers attentats en France ont fait « naître » cette activité. En 2018, une loi sur l’armement des agents de sécurité a été publiée, de même que les obligations de formation qui y sont associées. Au vu de la complexité de la réglementation, seules quelques entités très spécialisées se positionnent sur cette niche. Au-delà de quelques exemples, le marché ne semble pas se développer depuis. Il est évalué à long terme à moins de deux mille agents
Formation
Entre 2007 et 2019, la formation initiale minimum est passée de quarante à cent soixante-quinze heures, accompagnant ainsi la volonté de professionnalisation du métier. L’arrivée de la carte professionnelle en 2010 et celle du CQP APS (certificat de qualification professionnelle d’agent de prévention et de sécurité) ont assuré un fort développement des centres de formation. En 2018, le périmètre d'intervention du CNAPS s’est élargi au contrôle des centres de formation dont les pratiques restaient pour beaucoup douteuses : faux diplômes, sessions d’examens imaginaires ou fuite des sujets et questions… Cette inspection s’est soldée par la fermeture de la moitié des centres de formation en une année !
Les drones
Arrivés il y a dix ans, les drones ont surfé sur la vague de la nouveauté. Cependant, la loi a réglementé son usage et a réduit de façon importante les possibilités de s’en servir pour la sécurité privée. Il demeure néanmoins un dispositif à prendre en compte, car cette technologie pourrait, sur certains sites de superficie considérable, contribuer à optimiser les solutions de sécurité par efficience. Aujourd’hui, il est difficile de se faire une vraie idée du potentiel économique de ce segment à moyen terme.
Les robots
Faisant l’objet de moins de contraintes réglementaires, ces dispositifs sont en train d’acquérir une maturité technique qui laisse imaginer qu’ils pourraient trouver une place à moyen terme dans les solutions de sécurité. Deux obstacles restent cependant à franchir pour un réel déploiement : un modèle économique optimisé pour être rentable pour la sécurité privée et acceptable pour les clients, et une acceptation de ce changement par les clients. À date, nous pourrions parfois nous demander qui, des donneurs d’ordres et des prestataires, est prêt pour le déploiement de cette combinaison. Il arrive que les pressions sociales et certaines certitudes gagnent, malgré l’efficacité avérée.