Il y a peu, la justice française, par l’intermédiaire de la Cour administrative d’appel de Bordeaux, a rendu un arrêt intéressant concernant la sous-traitance d’une activité de sécurité et les règles qu’imposent le Code de sécurité intérieure aux entreprises.
L’affaire remonte à 2018 et un contrôle effectué par un agent de la délégation territoriale Sud-Ouest du CNAPS.
Ce dernier décide de sanctionner une entreprise car non seulement elle ne disposait pas de l’autorisation d’exercer l’activité de sécurité tout comme ses dirigeants qui ne disposaient pas de l’agrément de dirigeant. Ces deux documents sont pourtant indispensables pour exercer une activité de sécurité privée.
En 2021, le CNAPS et l’entreprise sanctionnée se retrouvent devant le tribunal administratif de Bordeaux. L’entreprise conteste la sanction en expliquant qu’elle n’est pas vraiment une société de sécurité privée. En effet, selon sa logique, elle ne faisait que commercialiser des prestations de sécurité mais se contentait en pratique de sous-traiter l’exécution réelle de ces missions. Elle expliquait encore que son sous-traitant, lui, était parfaitement en règle vis-à-vis de la règlementation applicable aux entreprises de sécurité privée.
Pour appuyer son argumentaire elle invoqua même une loi de 1975 relative aux règles classiques de la sous-traitance, qui n’imposeraient pas que le donneur d’ordre et le sous-traitant exercent la même activité ou doivent être titulaires des mêmes autorisations administratives.
Le tribunal administratif de Bordeaux pencha en faveur de l’entreprise.
En 2023, c’est à la cour administrative d’appel de Bordeaux de délivrer son verdict. Elle invalide le jugement du tribunal et statue en faveur de la sanction originelle du CNAPS.
Son argumentaire est assez clair : l’entreprise sanctionnée est bien une entreprise de sécurité privée car elle vendait des alarmes et des systèmes de vidéo-surveillance mais également des prestations de levée de doute ou du gardiennage conservatoire réalisées par des agents de sécurité. Le fait qu’elle n’ait en pratique ni les moyens matériels ou humains de réaliser ces prestations (puisqu’elle les sous-traitait intégralement rappelons-le) n’enlevait rien au fait qu’elle était bien une société de sécurité privée.
Elle devait donc avoir une autorisation d’exercer et ses dirigeants, détenir un agrément.
Notons que le fait que cette entreprise ne précisait dans aucun de ses documents commerciaux faire usage de sous-traitance a semble-t-il également joué dans la balance du jugement…
Ce jugement a le mérite de tordre le cou à de possibles cas de distorsion de concurrence.
En effet il impose très clairement à toute entreprise, dès lors qu’elle souhaite vendre des prestations de sécurité, de respecter les mêmes règles communes : être titulaire d’une autorisation d’exercer délivrée par le CNAPS et pour ses dirigeants, être titulaires de l’agrément correspondant.
L’équité et le respect des règles spécifiques du Code de Sécurité Intérieure ont ici primé !